Le X : plus qu’un coup de « com » !

Oiseau bleu et valeur réputationnelle

L’oiseau est mort, vive le X ! Rien ne fonctionne dans cette phrase. Pourtant, c’est une réalité. Et il ne s’agit pas d’une énième blague farfelue d’Elon Musk pour attirer l’attention. Marque emblématique d’Internet née en 2006, c’est un pan de l’histoire des réseaux sociaux qui s’envole vers d’autres cieux. Depuis le rachat de Twitter par Elon Musk, la mort de cet oiseau mythique d’Internet semblait annoncée. Mais on le sait, la valeur de Twitter, au-delà de ses fonctionnalités et de son usage, est ailleurs. Elle repose en grande partie sur son nom et son logo. Sa réputation en somme ! En d’autres termes, on parle de la survaleur, cet actif intangible qui accentue la puissance d’une entreprise, d’une marque, d’un dirigeant aux yeux des investisseurs, des utilisateurs, des marques et autres parties prenantes. Mais c’est aussi un univers sémantique qui disparaît, le verbe « twitter » n’existera plus. Le « tweet » non plus paraît-il. Quid des messages courts et des hashtags ? Pour X, c’est tout un univers, un imaginaire et une réputation à bâtir de toutes pièces au moment où Meta lance Threads pour venir précisément concurrencer Twitter.

Un repositionnement stratégique

Changer de nom est toujours un pari risqué. Car, il implique un changement de codes et de repères. Réinventer sans tout briser. Surtout quand il s’agit de délaisser un mastodonte de la puissance de Twitter (556 millions de membres actifs en Janvier 2023 dans le monde) avec un univers et une présence très marqués. Changer de nom, c’est la partie visible de l’iceberg. Il s’accompagne (souvent) d’un changement de cap et de vision pour une entreprise. Ici, c’est bien le cas. Plus qu’un basique « coup de com », c’est une nouvelle page qui s’ouvre, tant pour Internet qu’Elon Musk. Sans même faire allusion à la portée pornographique à laquelle il renvoie, le X, plus générique (à l’origine caractère Unicode pour système informatique) et cher à Elon Musk (En 1999 X.com devenait Paypal, SpaceX, X.AI, etc), devra s’imposer comme le nouveau réseau social total du 21e siècle. Plus qu’un réseau social, on parle déjà d’une « super-app » à l’image de WeChat en Chine. Un repositionnement stratégique dont les prémices se faisaient d’ores et déjà sentir en faisant payer les utilisateurs via un système d’abonnement (Twitter Blue), de limiter les contenus, de faire de la vidéo, de l’audio, du paiement, etc.

Par ailleurs, – sur un sujet de gouvernance – c’est un chantier pour la nouvelle CEO, Linda Yaccarino, qui doit, en tant que dirigeante, imposer sa patte à la tête de la plateforme face à un Elon Musk omniprésent. À titre d’exemple, la publication « X is here! Let’s do this. » de Linda Yaccarino a généré 20 millions d’impression contre 96 millions pour le « Our headquarters tonight » d’Elon Musk. Ce repositionnement stratégique est le parfait tremplin pour se faire connaître, être vu comme l’incarnation de ce renouveau et ainsi faire de X un levier réputationnel pour la nouvelle CEO. C’est dans cette optique qu’elle a pris la parole pour expliquer les détails et modalités à venir de ce nouveau Twitter.

Un changement de nom qui divise

Face à ce changement de cap et de nom, l’ensemble de la communauté Twitter se mobilise autour des #X, #Xitter et #LeX (en France). Depuis dimanche, on assiste en effet à une levée de boucliers et une tornade de moqueries de la part d’une grande partie des utilisateurs qui désespèrent de voir l’oiseau bleu s’envoler à jamais. Ce changement de nom a généré plus de 2 millions de messages dans le monde entre la journée de dimanche 23 juillet à mardi 25 juillet (sources : Talkwalker et Visibrain). Dans les commentaires, c’est principalement le changement de nom/logo qui fait réagir avec de nombreuses propositions de visuels alternatifs mêlant l’oiseau et le X et autres dévirés parodiques. D’autres, plus directs et explicites, propagent les images d’un oiseau bleu décapité. Du côté des communautés pro-Musk, ils soutiennent coûte que coûte leur champion (si soucieux d’obtenir l’approbation populaire de sa communauté) et valident ce changement. Au sujet de l’inquiétude et des interrogations soulevées par le fonctionnement futur de la plateforme, elles sont relayées au second plan des conversations. Une annonce à nuancer donc, qui loin de faire l’unanimité aura le mérite de faire du bruit.

Mais la grande question qui se pose désormais : bien que les parents soient connus, l’oiseau bleu arrivera-t-il à renaître sous X ?

Alban Saint-Joigny

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